La voiture autonome, sans conducteur (Driverless car) ne sera pas qu’un gadget accessible aux plus fortunés des conducteurs. Les constructeurs automobiles, acteurs des VTC ou entrepreneurs qui se penchent sur son avenir la considèrent moins comme un véhicule particulier (en gros une voiture individuelle qui se conduirait toute seule) que comme une innovation reposant à la fois sur :
- Des capacités techniques lui permettant d’être entièrement autonome
- Un business model fondé sur le partage (qui en fait le véhicule privilégié des VTC automatisés).
Projetons-nous dans un futur sans doute pas si lointain – et imaginons de quelle façon la voiture autonome va transformer notre monde…
Une réduction drastique des accidents de la route : voiture autonome = sécurité
En France, plus de 70 000 personnes ont été blessées dans un accident de la route en 2016. Ces accidents coûtent plus de 17 milliards d’euros aux collectivités. Avec des outils de vision par ordinateur embarqués surpuissants, la voiture autonome sera capable de prévenir la quasi-totalité des accidents. 96% sont liés à des facteurs humains (fatigue, perte de concentration, ivresse…). Le véhicule autonome fait preuve d’une vigilance extrême à tout moment. Il va sans dire que cette sécurisation accrue représente un gain notable, notamment pour la sécurité sociale (pour qui les accidents coûtent 2,6 milliards d’euros annuellement).
La voiture autonome va entraîner également une refonte complète des assurances. Re-définir les sujets liés à la responsabilité autour de la conduite autonome est une question épineuse, pour laquelle des experts seront forcément requis. Quant au modèle du ride-sharing, il a déjà conduit les sociétés d’assurance à revoir leurs offres depuis quelques années.
La reconquête des temps morts : voiture autonome = liberté
La voiture autonome viendra-t-elle à bout des bouchons ? Certainement, si on considère ceux qui sont dûs à des accidents ou à des pannes. Et ce n’est déjà pas une moindre conquête lorsque l’on sait que les bouchons ont un coût eux aussi de 17 milliards d’euros par an en France. Pour le reste le débat reste ouvert. Et il est certain que la voiture n’est pas le seul déterminant de la congestion urbaine.
Il existe une corrélation positive entre la capacité de trafic et les kilomètres parcourus. En clair, l’offre de trafic crée sa propre demande : si l’on ajoute une voie sur une route, il ne faudra pas longtemps pour qu’elle soit elle aussi saturée. Autant dire que les bouchons sont justes inévitables. En même temps, on estime qu’un véhicule autonome partagé pourrait rendre autant de services que 9 véhicules individuels. On pourrait donc s’attendre à une diminution rapide du nombre de voitures en circulation (mais avec des temps d’utilisation plus importants). Difficile de savoir lequel des deux effets va l’emporter.
Ce qui est sûr, et c’est bien la promesse de la voiture autonome, c’est qu’elle va nous permettre de nous réapproprier des temps de trajets considérés aujourd’hui comme perdus.
On peut envisager plusieurs axes pour l’utilisation du temps ainsi gagné. Premièrement, il deviendra banal de travailler dans sa voiture en allant au bureau. Cet atout est considérable pour les plus nomades des travailleurs. Ensuite, on offre un champ entier au développement du divertissement : Volvo annonçait déjà faire un partenariat avec Netflix, et certains imaginent les habitables transformés en surfaces tactiles permettant de vivre des expériences immersives en mobilité. Et au-delà du divertissement, c’est bien toute l’économie qui pourrait en bénéficier : les médias, le retail, bref, tout ce qui peut occasionner un acte d’achat réalisé pendant ce temps retrouvé.
Conséquence plus lointaine de cette reconquête du temps passé en transport, les espaces ruraux ou péri-urbains vont devenir plus attractifs. On peut s’attendre à une diminution des coûts du logement en ville, avec sa contrepartie : une augmentation du pouvoir d’achat des urbains.
La reconquête des espaces : voiture autonome = rationalité
L’impact sur l’urbanisme sera majeur. En France, il y a aujourd’hui environ 2,7 millions de places de parking. Or le principe de la voiture autonome, utilisée en flotte de véhicules partagés qui prennent successivement plusieurs passagers, c’est d’être toujours en service, et jamais « garée ». Récupérer les espaces de parking, c’est offrir la possibilité aux urbanistes et aux élus de dessiner une ville plus « smart ». Pourquoi ne pas favoriser les pistes cyclables, les voies piétonnes, les espaces verts, des logements neufs ? La voiture autonome crée un cercle vertueux de la mobilité dans les villes, plus qu’un changement incrémental dans la façon de se déplacer, elle permet une véritable mutation des espaces urbains.
Attention à un effet relevé par plusieurs experts : c’est tout le business model de certaines collectivités qui va devoir changer. Là où elles tiraient des revenus importants de taxes sur le carburant ou le parking municipal, on imagine davantage un système de redevance imposé aux opérateurs de flottes de véhicules autonomes.
Une consommation d’énergie décrue : voiture autonome = efficacité
Par une transition progressive vers le tout-électrique, il est clair que la voiture autonome va faire chuter très fortement la consommation d’énergie (surtout fossile). Si l’on pense de plus que l’avenir de la voiture autonome est le ride-sharing, c’est également le nombre de véhicules qui pourrait largement diminuer. La voiture autonome pourrait alléger de 45% la consommation d’énergie liée au transport routier.
Un marché du travail chamboulé…
En 2016, on comptait 60 000 taxis en France, 25 000 VTC et 300 000 routiers. La voiture autonome tient donc en joue de nombreux emplois et risque bien de transformer assez profondément ces différents secteurs. On doit évidemment s’attendre à des inquiétudes, voire de la réticence face à ce changement. Et il en sera de même pour les garagistes, les concessionnaires, et tous les vendeurs de pièces automobiles.
Par ailleurs, quasiment la moitié des interventions de la police, ou des secours en général, est liée à la route et au trafic. Un redéploiement des effectifs est à prévoir.
…mais enrichi d’opportunités.
Une telle disruption sur le marché de la mobilité entraînera par ailleurs des opportunités très nombreuses sur le marché du travail.
- Le marché de l’assurance aura un gros travail d’adaptation. Les compagnies d’assurances devront créer des nouvelles branches spécialisées dans la voiture autonome et le modèle de « ride-share ». Ce seront peut-être des start-ups qui auront les business model les plus adaptés pour ces nouveaux challenges.
- Le véhicule autonome, ce n’est certainement pas que des voitures : on peut désormais imaginer toutes les possibilités qui s’offrent aux constructeurs. Des véhicules seront sûrement affrétés pour la livraison de courses ou de plats, on peut également imaginer des véhicules d’utilité publique, comme pour le nettoyage des rues.
- Tout un champ s’ouvre pour les réseaux sans fil, avec désormais des travailleurs dans les temps de transport mais aussi des usagers en quête de divertissement. Il y a énormément d’opportunités pour les entreprises de l’entertainment d’utiliser la voiture autonome comme un nouveau canal.
- On peut aussi s’attendre à des changements dans le tourisme. La voiture autonome redore le blason du transport sur route, on observera sûrement une baisse sensible de l’usage du train et de l’avion. Ainsi s’ouvrira un potentiel nouveau aux espaces reculés des aéroports et des gares pour accueillir de nouveaux visiteurs.
Tout prête à penser que le gain de temps et d’énergie créeront d’immenses opportunités pour l’émergence de nouveaux secteurs. Comme le tourisme est apparu avec la réduction des temps de travail et la facilitation des transports, on peut s’attendre à des mutations profondes dans notre société grâce à la voiture autonome.
Inspiré de What happens when self-driving happens, @nabeel